La résurrection des punks (même pas morts !)

La résurrection des punks (même pas morts !)

Un esprit méchamment seventies réveille les punks dans cette sélection rock and roll du Festival Angoulême 2011. Plus de trente ans après les Sex Pistols, le no future se conjugue toujours au présent.

zumbiescouvPunk is not dead. D’ailleurs on ne résiste pas à faire un petit pogo dans la fosse aux zumbies d’un Sacré-Cœur réhabilité en nouveau temple hard rock pour assister à la reconversion d’un groupe de variét’ acidulée en morts-vivants tendance trash metal. Le monde semble tomber dans le chaos et ne trouve de remèdes que dans les révélations sous acide. bodyworldLes portes de la perception s’ouvrent par l’intermédiaire de ces planches arrosées au LSD ou roulées avec quelques nouveaux psychotropes fumables dégotés par le professeur Paulie Panther, l’expert en botanique de Body World. Un bouquet d’hallucinogènes aux délires visuels puissants. Mais avec la drogue, la cuite et la descente dévoilent dans l’inconsistance la cruauté du lendemain. couvlustEntre l’errance et la galère, le spectre de la mort : « Vis ce jour comme si c’était le dernier », explique Ulli Lust dans sa fugue initiatique à travers l’Italie. La liberté et l’insouciance d’un éternel adolescent ou d’un incurable junky jetés dans les méandres d’un jeu de construction et de déconstruction rejoignent les turpitudes psychédéliques des malades atteints du syndrome de Warhol dans une crise identitaire généralisée. couvwarholcouvwarholPour Ulli, le voyage s’arrête, pour d’autres cette quête insatiable s’affirme par le besoin de vivre, d’échapper à l’angoisse et aux bad trips, avec à chaque nouveau départ une fuite en avant.

Les visions hallucinées et toxiques de Doug alias Nit-nit dans le premier volet de ToXic donnent lieu à un chef-d’œuvre du genre. Charles Burns revisite la houppette d’un Tintin malade métamorphosé façon punk et maintenu par une camisole chimique dans un état second. À la recherche d’une vision de Inky, son chat noir, la silhouette tintinoïde déambule en pyjama et en peignoir rose dans les cut-up d’une narration qui transpose l’icône d’Hergé dans le Festin nu de William Burroughs. toxicUn héros à la dérive, aspiré par les gouffres graphiques de l’auteur de Black Hole. Pour son premier livre en couleurs, Burns construit un univers hybride peuplé de souvenirs, d’extraterrestres et de fœtus terrifiants. L’auteur s’amuse des références graphiques et familières de la ligne claire du héros fétiche et cristallise les angoisses en projetant des visions cauchemardesques et oppressantes. Le premier volet de ce diptyque injecte une première dose avec déjà l’envie de goûter davantage. Une œuvre révélatrice d’un malaise plus grand et d’une révolte en germe qu’on a du mal à contenir dans les cases.

Lucie Servin

Humanite.fr

Extraits Punk de la selection officielle d’Angoulême 2011

  • Trop n’est pas assez, d’Ulli Lust. Traduction de Jörg Stickan, lettrage d’Amandine Boucher et Hélène Duhamel. Éditions Ça et là. L’ouvrage a remporté le prix Artemisia 2011, le seul prix de BD féminin qui récompense chaque année une dessinatrice.

Prix artemisia
Éditions Ça et là